Les salaires de nos ancêtres

Publié le par Jean-Claude Drion

L’estimation des salaires est un sujet d’une grande complexité. En effet, les données restent trop souvent éparses et les informations disponibles concernent surtout le XVIIIe siècle. De plus, les modalités de paiement sont diverses et le taux des rémunérations est soumis à d’importantes variations géographiques ou saisonnières. Ces contraintes rendent difficiles les comparaisons rigoureuses entre les professions, les lieux et les époques.

La grande diversité des salaires et des gages

Pour mémoire :

 1 livre tournois = 20 sous (ou sols).
 1 sou = 12 deniers.
 donc 1 livre tournois = 20 sous = 240 deniers.

Le prix du pain (1 livre = de 300 à plus de 600 g) :

 1 pain de 4 livres : 8 sols en moyenne, mais 5 sols dans les années d’abondance céréalière et au moins 12 sols dans les années de mauvaises récoltes.

 1 kg de pain blanc : de 0,40 F à 0,43 F de 1855 à 1913

La consommation de pain :

Selon Vauban, pour une famille de manouvrier de quatre personnes dont deux enfants, la consommation annuelle de blé - moitié seigle, moitié froment - est de 10 setiers, soit environ 800 grammes par jour et par tête.

Pour comprendre et estimer le montant des salaires de l’Ancien Régime, il faut tenir compte de plusieurs critères :

 le salaire des femmes et des adolescents est généralement inférieur de moitié à celui des hommes, et le salaire des enfants est inférieur de moitié à celui des femmes.

 à l’intérieur d’un même métier, les différences de salaires sont liées au degré de qualification.

 les rémunérations des travaux agricoles de la pleine saison (de mars à septembre/octobre) sont supérieures de près du double à celles de la saison morte (de septembre/octobre à janvier).

 les salaires sont plus élevés dans les villes et à proximité des centres urbains que dans les zones les plus reculées sans voies de communication.

 selon les situations, le salaire était réglé à la pièce (tant pour un produit fini), à la tâche (tant pour la main-d’œuvre), à la journée de travail (de 10 à 13 h), à la semaine, au mois ou à l’année.

 les salaires à la pièce, à la tâche et à la journée étaient rarement versés en argent liquide. Le plus souvent, le règlement était mixte : une partie en argent et le reste en denrées, en échange de biens ou en services.

 enfin, dans certains cas, le salarié était logé, nourri et blanchi et il avait parfois droit à des avantages en nature (une paire de sabots offerte, par exemple).

Exemples de salaires à la tâche ou à la journée

 Semailles et frais de labours pour un champ de montagne : 46 livres et 8 sols en 1774 (d’après M. Dorigny).
 Labourage et frais de moisson pour un champ de montagne : 18 livres en 1775 (d’après M. Dorigny).
 Dépense de fumier dans les vignes : 58 livres 16 sols en 1776 (d’après M. Dorigny).
 «  Raccomodage  » des vitres d’une maison puis faire à neuf celle du cabinet : 4 £ en 1741 (d’après M. Vernus).
 6 journées à «  aider à faucher au foin  » : 2 livres 10 sous en 1741 (d’après M. Vernus).
 4 journées à «  aider à battre  » (battage des céréales) : 2 livres en 1741 (d’après M. Vernus, ouv. cité).
 7 journées à «  aider à refaire le mur du champ en 1741  : 7 livres 3 sous (d’après M. Vernus).
 5 journées de charron pour un chariot neuf : 7 livres en 1742 (d’après M. Vernus).
 1 journée de menuiserie pour confectionner un buffet : 10 sous en 1743 (d’après M. Vernus).
 1 journée pour coudre du cuir : 10 sous en 1745 (d’après M. Vernus).
 1 journée de 10 heures de travail à entrer la luzerne : 20 sous en 1800 (d’après le Journal de D. Boutrouë).
 4 journées à scier et percer deux grandes échelles : 2 livres 8 sols en 1718 (d’après Duchemin du Tertre).
 5 journées à rompre du bois en 1723  : 3 livres (d’après Les Comptes de Duchemin du Tertre).
 2 journées de travail pour abattre une loge en ruine : 34 sols en 1724 (d’après Duchemin du Tertre).
 1 journée de maçonnerie pour enduire de chaux une cour : 15 sols en 1730 (d’après Duchemin du Tertre).
 Pour le charroi d’une charretée de foin : 15 livres en 1748 (d’après Les Comptes de Duchemin du Tertre).
 1 journée de couvreur à réparer une toiture : 15 sols en 1749 (d’après Les Comptes de Duchemin du Tertre).

Voir le livre de Thierry Sabot

Lire le sommaire détaillé

Nos ancêtres utilisaient-ils de la monnaie sonnante et trébuchante dans leurs règlements quotidiens ou vivaient-ils, en marge du système monétaire, dans un espace économique régulé par l’autoconsommation ou, au mieux, par le troc ? Sujet majeur, car il nous interroge sur la place de la monnaie dans la vie de nos ancêtres mais aussi sur leur rapport à l’argent. Il s’agit du deuxième numéro de Théma, la nouvelle collection d’histoire et de généalogie..

Publié dans La Généalogie

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